lundi 30 décembre 2024

L'année 2024 et la culture

 

La montgolfière abritant la flamme olympique
L'année 2024 à Paris a été marquée par de nombreux événements majeurs, couvrant des domaines variés comme le sport, la culture et l'histoire. Tout d'abord, l'événement phare de l'année a été sans aucun doute constitué par les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Contrairement au choix effectué par plusieurs villes qui ont hébergé les JO, la ville de Paris a choisi de faire dérouler les compétitions dans des lieux emblématiques tels que le Stade de France ou aux pieds de la Tour Eiffel.

En parallèle des compétitions sportives, l'Olympiade Culturelle a proposé une série d'événements artistiques, dont des expositions, des spectacles et des installations, illustrant le lien entre sport et culture. 

Après plusieurs années de rénovation, le Grand Palais a rouvert ses portes, accueillant des expositions majeures et redevenant un centre névralgique de la culture parisienne.

Le Musée d'Orsay a proposé quant à lui l'exposition immersive "Un soir avec les impressionnistes, Paris 1874", une expérience en réalité virtuelle plongeant les visiteurs dans l'atmosphère de la première exposition impressionniste​. 

En décembre 2024, un autre moment fort a été la réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Après l'incendie dévastateur d'avril 2019, l'édifice a réouvert ses portes le 8 décembre 2024, marquant un moment émouvant pour les Parisiens et les visiteurs du monde entier​.

Ces événements ont contribué à renforcer la position de Paris comme capitale de la culture, offrant aux résidents et aux visiteurs une programmation riche et diversifiée tout au long de l'année. On verra ce que 2025 prépare pour nous! Bonne année !

samedi 21 décembre 2024

Les vitrines de Noël


Un moment des animations de cette année dans une des vitrines
du Bon Marché 
Les vitrines animées sont une tradition du Noël parisien. L’idée de décorer les vitrines pour le temps des fêtes a commencé à émerger avec l’apparition des grands magasins, tels que Le Bon Marché, qui a été l’un des premiers à Paris à développer le concept de la vitrine commerciale. Ces vitrines décorées jouaient sur des thèmes festifs et saisonniers pour créer un attrait visuel. 
Dans les années 1920-1930, les vitrines ont commencé à devenir plus élaborées. Après la Seconde Guerre mondiale, l’innovation technologique a permis l’introduction de mécanismes animés, transformant ces vitrines en véritables spectacles. Les grands magasins comme les Galeries Lafayette, Le Printemps, et La Samaritaine ont popularisé cette pratique en y ajoutant des marionnettes, des automates, et des scènes miniatures représentant des contes de fées ou des paysages hivernaux. L'idée était d'offrir une expérience magique aux adultes et aux enfants, en racontant des histoires.
Dans les années 1950 et 1960, ces vitrines sont devenues de véritables attractions, attirant des familles entières qui venaient les admirer. C’est à cette période que les vitrines ont commencé à être accompagnées de musiques, de lumières, et de scénographies plus détaillées. Avec le temps, les vitrines sont devenues de plus en plus sophistiquées, intégrant des jeux de lumière, des animations électroniques, et même des collaborations artistiques. Aujourd’hui, les vitrines animées des grands magasins parisiens sont un rendez-vous incontournable de la saison hivernale. Chaque année, des équipes de décorateurs, scénographes et artistes travaillent pendant des mois pour créer des thèmes originaux et magiques, avec l’intégration de technologies modernes telles que l’éclairage LED et les effets numériques. Les Galeries Lafayette et Le Printemps restent des pionniers dans cette tradition, dévoilant chaque année des vitrines spectaculaires et souvent accompagnées d'événements spéciaux. Chaque année, les vitrines attirent des milliers de visiteurs dans la période de Noël, et constituent désormais un véritable événement culturel et touristique dans la capitale française.

mardi 17 décembre 2024

Archipels littéraires: un travail très ancien qui fait toujours partie de moi

Il y a presque vingt ans, lors de mes travaux de recherche pour ma première thèse, j'ai effectué une série d'entretiens avec des écrivains que j'étudiais. Ces entretiens ont été recueillis et publiés sous le titre d'Archipels littéraires par la maison d'édition Mémoire d'encrier de Montréal. Il s'agit d'un livre tout compte fait assez modeste, mais qui, de manière inattendue, suscite toujors un certain intéret. 

Ces entretiens avec neuf écrivains caribéens m'ont permis de convoquer un ensemble de questions qui, à l'époque, étaient pertinentes: existe-t-il un « roman caribéen francophone»? la critique contemporaine a-t-elle pu en saisir les problématiques? Les contraintes d’ordre géographique et linguistique, l’intertextualité, et les rapports des auteurs interviewés avec la spatialité et la temporalité sur lesquels je les ai interrogés étaient à l'époque moins étudiés que les limites de la francophonie. Si les écrivains en sont venus parfois aux lieux communs du discours critique quant à certains thèmes comme l’identité, l’exil, ou l’errance, la juxtaposition de leurs points de vue peut toujours susciter des perspectives de lecture originales. 

Le 15 décembre 2005, l'émission 10 minutes pour le dire avec Gora Patel a été consacrée à Archipels littéraires Voici (en deux parties) la vidéo qui a été transmise sur RFO-France Ô.



La chaîne télévisée 3A Télésud a consacré un épisode de l'émission "Des mots et débats", avec Patricia Drailline, au débat sur mon recueil d'entretiens. Ci-bas on peut regarder l'entretien (toujours en deux parties) qui a été transmis plusieurs fois au cours du mois de mai 2006.




Lisez les des comptes rendus concernantArchipels Littéraires parus sur La Tribune des Antilles et sur Le Devoir (ci-bas): 

vendredi 13 décembre 2024

Paris en toutes lettres

Je n'ai pas toujours vécu à Paris. Voici un petit texte nostalgique, qui se réfère à ce temps où j'y venais seule sur un coup de tête, et qu'il y avait encore la carte orange à la place du pass navigo...


Un jour à Paris 

J’arrive à Paris le matin. Le quai de la gare est une préfiguration de ce qui m’attend. Un échantillonnage d’êtres humains aux yeux poisseux pour la nuit passée dans le train mais éclairés par l’émotion de l’arrivée. Les trains pour Paris accouchent d’une humanité pacifique et étonnée. Ceux qui viennent de loin devraient toujours activer leurs sens petit à petit, pour ne pas laisser la ville prendre le dessus. J’ai élaboré un rite pour l’affronter sans me faire ingurgiter. Avant d’appeler quelqu’un qui peut m’héberger pour une nuit ou deux, je regarde les yeux des autres voyageurs, et je cherche d’y voir la couleur du ciel de Paris. Si mon bagage n’est pas trop lourd et la lumière est propice, je quitte à pieds la gare de Lyon en me dirigeant vers Place d’Aligre, à deux pas de là. Avec un peu de chance, c’est le jour du marché. J’aime regarder Paris depuis ici. Les couleurs de la brocante made in Taiwan, les têtes des vendeurs ensommeillés, la lumière qui se transforme en poussière me surprennent à chaque fois. Et à chaque fois j’observe, jusqu’à percevoir quelque chose de Paris qui m’avait échappé jusqu’à ce moment.

Je me concentre sur le toucher et je touche tous les objets exposés sur les stands ou par terre, déchaînant ainsi la fureur des marchands. Je lis le braille de ce lieu : je sens la trame des tissus qu’on ne fabrique plus, je laisse glisser mes doigts sur les bibelots en verre soufflé, j’effleure la quincaillerie comme s’il s’agissait d’un précieux trésor. Je suis dans mes doigts, et grâce au sens du toucher je perçois la patine qui recouvre cette brocante à bas prix. Je choisis un objet. Un presse-papiers en bois chaud et lisse. Pendant que je le garde entre mes mains, sans me faire remarquer, je l’approche de mon nez. Je sens l’histoire du bois à travers son odeur. Puis, j’effeuille les livres anciens et j’en aspire la poussière. L’odorat me permet de m’apercevoir pour la première fois de l’agressivité de la ville : Paris sent fort, avec ses bacs à ordures mal fermés, et les excréments de chien qui étoilent les trottoirs. À ce point, mes oreilles se laissent envahir spontanément par le son du français. Je commence à tirer sur les prix et à écouter les voix. Je parle à un marchand de ce presse-papiers en ébène que je sais trop cher, histoire d’entendre la langue française qui envahit ma bouche et modifie l’expression de mon visage. Avant de repartir je mange quelque chose pour compléter mon éveil sensoriel. Je m’arrête dans une boulangerie ou au supermarché qui a longtemps hanté la place avec une énorme silhouette de Zidane qui disait: J'aime bien vous faire gagner. C’est seulement après cette initiation complexe que je suis prête pour la ville.

Quand mon rite propitiatoire est efficace, il me permet d’entrer dans un monde candi. Les personnes qui explorent, parcourent et vivent Paris peuvent être très différentes. L’impossibilité de cataloguer leur besoins a simplifié le langage que la ville utilise pour communiquer avec eux, mais en a conservé la magie. En fait il ne suffit pas que le mode d’emploi de Paris soit clair et lisible. Pour rencontrer les goûts de chaque passant, il doit être aussi captivant. Ces nécessités pratiques et communicatives ont favori l’énorme diffusion de gadgets métropolitains. Les cartes bariolées et translucides qui portent les messages entre Paris et ses invités sont un manière pour la ville de s’imposer en séduisant. Le charme pop de la carte orange transforme l’abonnement aux transports parisiens en objet d’attentions fétichistes. Une fois rentrés à la maison on la conserve, les adolescents la collent dans leur journal, les superstitieux la relèguent au fond d’un tiroir pour ne pas jeter leur propre image. La carte orange en effet nous regarde de nos propres yeux plantés au beau milieu d’un petit rectangle aux couleurs voyantes. Elle a un pouvoir symbolique et rituel : elle est toujours valable, elle est individuelle, elle est personnalisée avec les données personnelles et la signature, elle suit le voyageur jusqu’à la mort. Le numéro de la carte nous pénètre et il devient nous. Au début de chaque mois ou de chaque semaine, on achète le coupon des dimensions d’un ticket de métro, mais aux couleurs coordonnées à celles de la carte, et le moyen pour en prendre possession, pour le rendre inaliénable, c’est d’y écrire dessus le numéro de carte orange, en acceptant implicitement d’être identifié comme P 185954 à chaque déplacement. Une fois entrés dans ce système, on peut insérer le coupon dans la poche prévue à ce fin dans la pochette pour carte orange, et jouir de l’ineffable étincellement de l'hologramme imprimé dessus. Beaucoup d’autres objets produits par la ville possèdent un magnétisme comparable à celui de la carte orange. Les cartes téléphoniques, les tickets de métro, les cartes d’accès aux bibliothèques, les cartes de fidélité aux magasins, les hebdomadaires consacrés aux événements urbains nous font sentir les membres d’un club exclusif. Nous sommes heureux de nous livrer à la dimension merveilleuse et irréelle crée par ces objets. Nous nous perdons sans crainte dans le monde des collectionneurs de cartes téléphoniques en nous sentant obscurément sauvés, contrôlés par un grand frère...

Il m’est arrivé souvent d’apercevoir l’essence de cette ville polymorphe à des moments dans lesquels je ne m’attendais rien de particulier. Fauchée comme je suis, j’ai cycliquement l’exigence de manger de la nourriture passablement fraîche, ou du moins non en boite, sans dépenser une fortune. À Paris la combinaison de ces deux caractéristiques est un vrai luxe. En obtenir une seule, par contre, n’est pas difficile. Des brochettes de viande avariée ou brûlée peuvent e trouver à un prix honnête dans les quartiers les plus malfamés, tandis que des frits et des légumes très frais sont servis dans les restaurants à des prix stellaires. Ainsi, quand j’ai une cuisine à ma disposition, je me lance sur les marchés alimentaires. Quand je décidai de me rendre pour la première fois au marché Dejean, quelque chose m’échappa. Je descendis au métro Château-Rouge et m’aperçus que je ne mangerais pas ce jour-là. Les trottoirs étaient couverts de feuilles pourries et de chiffons bariolés. Les dernières camionnettes partaient rapidement en abandonnant les piles de caisses vides à même le sol. Les chiffons qui absorbent l’eau des égouts étaient couverts de trognons et de déchets végétaux. Le marché était terminé. Je venais de passer une heure dans le métro, donc je ne partis pas tout de suite. Je commençai à flâner en m’enivrant de la puanteur marcescente des légumes écrasés par les passants. Mais je n’eus pas le temps de vivre cette déchéance car à la fin de la rue parut un maigrichon avec un jean troué, une veste en cuir, un gros chien sans laisse et un tas de punaises. Il avait l’air sympathique, sans doute parce que ses cheveux à moitié décolorés fuyaient dans tous les sens, à cause d’une vaine tentative d’attacher en dreadlocks sa chevelure très lisse. On se regarda un instant, je croyais qu’il s’agirait d’un de ces passants parisiens dont je me souviendrais sans qu’ils m’adressent la parole. Par contre, au moment où on se croisa il me dit: "Liberté dans la vie." Et avant que je puisse m’étonner: "et dans l'amour...". Puis il prit à me parler, comme s’il m’avait toujours connu : « N’est-ce pas ? La liberté est le plus important ». Et debout au milieu de la rue, avec le chien poisseux qui nous tournait autour, nous commençâmes à parler de liberté, égalité et fraternité. Depuis, quand je pense à Paris, c’est à cette image incongrue que je pense.


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jeudi 12 décembre 2024

Faisons corps!

J'aime bien parler des expos gratuites car beaucoup de personnes me disent qu'il est impossible de se cultiver à Paris sans dépenser beaucoup d'argent, alors que ce n'est pas tout à fait vrai. Jusqu'au 4 janvier 2025, le MAIF Social Club présente le travail de quatorze artistes réunis sous le titre Faisons corps.
C'est une expo dans laquelle on peut toucher la plupart de ce qu'on voit, où le spectateur n'en est plus un, car il interagit avec certaines des œuvres et, dans quelques cas, il les modifie. Le corps est vu dans son intimité (surtout dans la première partie, consacrée au corps anatomique) mais aussi dans son unicité et son individualité. Le visiteur est également invité à bouger, à se laisser toucher par les autres, et c'est là que le corps est présenté dans sa signification sociale. 
Le titre de l'expo est aussi, quelque part, son objectif, et il est significatif que le lieu qui héberge cette exposition soit un lieu de culture militante et d'éducation informelle en plein cœur du Marais.

mardi 10 décembre 2024

L'histoire de mon lieu de vie: le quatorzième arrondissement


J'habite le quatorzième arrondissement de Paris, auquel je suis particulièrement liée pour une série de raisons. Connu pour ses quartiers vivants et diversifiés comme Montparnasse, Alésia et Plaisance, cet arrondissement est aujourd'hui un véritable carrefour d'art, d'urbanisme moderne et de traditions parisiennes. Mais pour comprendre l'âme de cet arrondissement, il faut revenir sur son histoire, faite de transformations sociales, culturelles et urbaines.

Avant d'être intégré à Paris en 1860, lors de l'extension de la capitale décidée par Napoléon III, le territoire du 14e était principalement constitué de petits villages agricoles. On en trouve facilement la trace aujourd'hui, car en se promenant dans cette zone, on entrevoit souvent des routes pavées bordées de plantes (et parfois meme de quelques animaux fermiers) qui se trouvent aujourd'hui souvent à l'intérieur d'immeubles insoupçonnables à l'allure parfaitement urbaine. Les hameaux comme Petit-Montrouge, Plaisance et Montsouris, tous entourés de terres agricoles, ont joué un rôle important dans la construction de Paris, notamment grâce à l'exploitation des carrières de calcaire qui servaient à bâtir de nombreux monuments parisiens. Plus tard ces carrières ont hébergé les catacombes, aujourd'hui constituant un attrait touristique important. Avec l’annexion de ces communes en 1860, l’actuel 14e arrondissement fut formé, marqué par une urbanisation rapide et une réorganisation du territoire. Dès lors, ce qui était autrefois un espace rural et périphérique devient une partie intégrante de la ville, se dotant peu à peu de ses infrastructures modernes.

La construction de la gare Montparnasse, dans les années 1840, et de la tour Montparnasse dans les années 1960 et 1970 ont aussi contribué au changement du caractère de l'arrondissement. Si la tour a suscité des controverses esthétiques, elle demeure un symbole de l'architecture moderne à Paris. Le quartier Montparnasse a joué un rôle central pour les artistes au début du 20e siècle, car il a attiré nombre de figures artistiques et intellectuelles du monde entier. Dans les années 1920 et 1930, des artistes comme Pablo Picasso, Amedeo Modigliani, et Jean Cocteau y vivaient et fréquentaient des cafés comme La Rotonde, Le Dôme et La Coupole. Ces établissements sont devenus des lieux mythiques de rencontre, où peintres, poètes et écrivains se réunissaient pour débattre, créer et s'inspirer les uns des autres. Le Montparnasse de cette époque était un lieu de foisonnement culturel, surnommé "La Nouvelle Athènes". Ce quartier a vu naître le mouvement surréaliste et a accueilli les débuts de nombreuses stars de l'art et de la littérature du 20e siècle. Aujourd'hui encore, l'ombre de cette période faste plane sur le 14e arrondissement dont la rue de la Gaité affiche toujours complet dans ses nombreux théatres. Plus au sud, toujours dans le 14e, près du Parc Montsouris, on trouvera aussi un quartier des artistes, très reconnaissable par les grandes baies vitrées caractérisant les ateliers-appartements. Dans ce quartier, caractérisé par une grande effervescence créative, se trouve également l'atelier-musée Chana Orloff. 

Aujourd'hui, le 14e arrondissement continue d'évoluer. Ses quartiers, chacun avec une identité propre, allient modernité et tradition. Le parc Montsouris offre un havre de paix aux citadins, tandis que les rues animées du quartier Alésia attirent les amateurs de shopping. Les espaces verts, les écoles et les centres culturels en font un lieu de vie prisé des familles et des étudiants. Le réseau des hypervoisins - un réseau Faceebook et Whatsapp réunissant les habitants du 14e témoigne de l'atmosphère de solidarité qu'on respire dans le quartier. Le 14e arrondissement reste aussi un lieu de mémoire, où l’histoire se mêle à la vie quotidienne. Les anciens ateliers d’artistes de Montparnasse cohabitent avec des immeubles modernes, tandis que des cafés historiques continuent d’accueillir écrivains et rêveurs.

Que ce soit pour flâner dans les ruelles de Plaisance, visiter les Catacombes ou profiter de la vue panoramique depuis la tour Montparnasse, cet arrondissement offre un riche panorama de l’histoire et de la diversité parisiennes.

samedi 7 décembre 2024

Ma vie d'avant: ma première thèse

Longtemps avant d'emménager à Paris et de m'inscrire en doctorat ici, j'avais déjà obtenu un doctorat en littératures francophones à l'Université de Bologne sous la direction de Carminella Biondi. Le titre de cette première thèse, qui a été soutenue en 2006 est: « Papa, il reviendra hier »: les représentations du temps dans la littérature caribéenne francophone contemporaine.
J’avais étudié le temps en tant que catégorie critique, en me focalisant surtout sur sa représentation dans la littérature caribéenne contemporaine. Dans ce champ, en fait, des nombreuses œuvres montrent la coprésence de différentes perceptions temporelles. La polysémie du terme représentation a constitué le point de repère principal au cours de mes recherches car les images, mais surtout les caractéristiques de la représentation iconographique et littéraire, sont souvent un moyen, pour les narrateurs des romans, de déconstruire et réinventer le temps. Ma thèse était également consacrée au repérage des textes dans lesquels le temps est un des thèmes de la narration. L’étude approfondie de chaque roman est organisée de manière complexe, et sa section centrale se divise en passé, présent et futur. Cette articulation est ensuite dépassée au cours de la thèse, qui montre que le temps est souvent la métaphore d’un sens d’inadéquation, d’inauthenticité et de frustration par rapport au quotidien. Les caractéristiques de sa représentation dans le roman caribéen montrent la volonté d’imaginer une dimension plus appropriée à la libre expression créative de soi.
Au-delà de la thèse en elle-même, j'ai un bon souvenir de mon premier doctorat, qui m'a offert la possibilité de vivre des expérience formatrices comme des séjours de recherche à la Sorbonne Université et à l'Université des Antilles-Guyane, des rencontres, des publications (surtout ce recueil d'entretiens), des collaborations avec des groupes de recherche qui ont été très stimulantes.
Je suis certaine que je n'aurais pas abordé ma thèse actuelle de la meme manière si je n'en avais pas une autre derrière moi. Bien qu'un résumé ne puisse pas en rendre compte, le fil conducteur entre ces deux travaux est certainement la liberté.

jeudi 5 décembre 2024

Notre Dame revient à Paris

Le 15 avril 2019, l'un des événements les plus tragiques de l'histoire récente de Paris a eu lieu : un incendie dévastateur a ravagé la cathédrale Notre-Dame de Paris, l'un des monuments les plus emblématiques de la capitale et un chef-d'œuvre de l'architecture gothique.
L'incendie a débuté vers 18h30 sous la charpente en bois du toit, souvent appelée "la forêt" en raison du grand nombre de poutres en chêne qui la constituaient, certaines datant du XIIIe siècle. En l'espace de quelques heures, les flammes se sont rapidement propagées, détruisant la plus grande partie du toit et menaçant l'ensemble de la structure.
L'image de la flèche de Notre-Dame, conçue par l'architecte Eugène Viollet-le-Duc au XIXe siècle, s'effondrant sous les flammes, a marqué le monde entier. Les pompiers ont lutté pendant près de 15 heures pour maîtriser le feu, empêchant ainsi la destruction complète de l’édifice.
L'origine exacte de l'incendie demeure incertaine, mais les enquêteurs privilégient la piste accidentelle, liée à des travaux de rénovation qui étaient en cours à l'époque. La charpente en bois, très ancienne, était particulièrement vulnérable à ce genre d'incident. Aucune trace d'acte criminel n'a été découverte lors de l'enquête.
L'une des pertes les plus symboliques a été la flèche, qui s'est effondrée, ravagée par les flammes. La quasi-totalité du toit, dont la structure médiévale en bois, a été détruite. Bien que l'incendie ait principalement affecté l'extérieur, certaines parties de l'intérieur ont également été touchées, notamment certaines des voûtes qui se sont effondrées sous le poids du toit en flammes. La plupart des trésors de Notre-Dame, comme la Couronne d'épines (relique précieuse), la tunique de Saint Louis et d'autres objets religieux, ont été sauvés grâce à l’intervention rapide des pompiers et des autorités.
Immédiatement après l'incendie, des donateurs se sont mobilisés en France et à l'étranger, pour entamer immédiatement la reconstruction. efforts ont été entrepris pour stabiliser la structure et protéger l'édifice des intempéries. Il a été décidé de reconstruire la cathédrale à l’identique. Le président Macron a confirmé que la flèche serait reconstruite selon les plans originaux de Viollet-le-Duc en 5 ans.
Effectivement il y a quelques jours la statue de Notre-Dame a fait retour dans l'église, et demain, le 7 décembre l'inauguration officielle aura lieu, accompagnée de cérémonies religieuses. Le 8 décembre, jour de l'immaculée conception, auront lieu la première messe et la consécration de l'autel. 

mardi 3 décembre 2024

Paris et la liberté


Nous parlerons aujourd'hui d'un roman qui se déroule en partie à Paris: Atti osceni in luogo privato de Marco Missiroli, publié en français sous le titre Mes impudeurs. C'est un vieux roman, mais d'autre part, ce blog n'existe que depuis un mois, donc c'est une bonne occasion pour redécouvrir certaines lectures.

Mes impudeurs est un roman d'apprentissage, organisé en six parties qui parcourent les différents âges du protagoniste et narrateur, Libero Marsell. Comme le titre le laisse imaginer, l'aspect sexuel est très important dans la formation de Libero, dont la vie est constellée par un rapport avec le sexe qui évolue et murit avec lui. Pourtant, un des personnages par lesquels le sexe fait irruption dans la vie de Libero étant une bibliothécaire, les livres aussi jouent un rôle important: « Les livres déplaçaient ma gravité, et actualisaient une loi: ils avaient commencé à me mettre au monde » (ma traduction).

Ainsi Paris, où le protagoniste habite et évolue dans la première partie de sa vie et du roman, est une présence très littéraire, car Libero travaille aux Deux Magots, croise Jean-Paul Sartre, voit des films, respire un air du temps qui est aussi un air du lieu. La vie le mènera Libero à la grave décision d'aller vivre à Milan: « Les Deux Magots, Philippe, les touristes, la fureur des réunions, le cinéma Louxor, le Marais et le fauteuil de papa, maman et Emmanuel, Marie et l'hôtel de Lamoignon, la langue française, le Roland Garros, les cédilles. Ça me coupa le souffle. Je m'assis et restai immobile, puis je pris une feuille blanche et j'écrivis tout petit : Pour insoutenabilité. Voilà la raison pour laquelle j'avais quitté la Ville Lumière » (ma traduction). Ces épiphanies sont fréquentes dans le roman et expriment bien la manière dans laquelle Libero avance dans la vie. 

À Milan aussi, Libero est confronté aux tourments de ses désirs et à l'impact de ces derniers sur ses relations amoureuses et familiales. Il tente de comprendre ses pulsions, traverse des expériences parfois maladroites, souvent intenses, où se mêlent la peur, le plaisir et la culpabilité. Ses relations avec ses parents sont un élément central de son développement personnel et sexuel, reflétant un mélange complexe d'attachement et de distance. Son objectif demeure celui de réaliser la liberté qui est inscrite dans son prénom.

Missiroli aborde sans détour des thèmes comme l'érotisme, le désir et les contradictions intimes que chacun porte en soi, offrant une réflexion sur la manière dont la sexualité façonne nos vies et notre rapport aux autres. Car il ne faut pas avoir « peur de choisir entre la vie et l'obscénité sans savoir qu'elles sont la même chose. L’obscène est le tumulte privé que chacun a, et que les personnes libres vivent. Cela s'appelle exister, et parfois ça devient sentiment » (ma traduction).